Une onde de choc secoue les rouages financiers du gouvernement libérien. Des chiffres astronomiques révèlent une faille dans le système. La Commission Générale d’Audit (GAC) dévoile des anomalies préoccupantes.
L’audit de conformité mené par la GAC a mis en lumière une malversation d’environ 6,7 millions de dollars américains par l’Autorité des Revenus du Libéria (LRA). Ces fonds, destinés au Gouvernement du Libéria (GOL), provenaient des revenus générés sous l’Accord d’Inspection de Destination avec MedTech Scientific Limited. Depuis le 1er juillet 2022 jusqu’au 31 octobre 2024, la LRA a détourné la part de 20% des revenus, au lieu de les déposer dans le Fonds Consolidé comme stipulé.
L’Accord d’Inspection de Destination, signé le 21 avril 2021, impliquait plusieurs agences gouvernementales clés, dont le Ministère des Finances et de la Planification du Développement et le Ministère de la Justice. Selon le rapport de la GAC, la section 1.0 (2) du Protocole d’Entente entre MedTech Scientific Limited, le gouvernement et Ecobank Liberia Limited prévoyait que tous les frais payés par les exportateurs et importateurs soient versés sur un compte transitoire désigné pour distribution ultérieure. Toutefois, la LRA a conservé les fonds dans le compte de MedTech et a effectué des demandes de paiement directes en faveur de la LRA, enfreignant ainsi les termes de l’accord.
En réponse, la LRA a affirmé que le Code des Revenus du Libéria et l’Accord d’Inspection de Destination autorisent la collecte directe des frais de services douaniers pour l’émission de documents et services connexes. Elle a également mentionné l’attente de la conclusion d’une affaire à la Cour Suprême impliquant MedTech, ce qui retardera les discussions nécessaires pour corriger les « défauts et anomalies » de l’accord initial. Parallèlement, les fonds issus du contrat MedTech sont désormais inclus dans le budget national de l’exercice financier 2025, acheminés via un compte transitoire créé par le gouvernement.
La GAC a rétorqué que le Règlement B.8 (1) de la Loi sur la Gestion Financière Publique (PFM) de 2009, amendée en 2019, exige que tous les fonds publics collectés par les agences gouvernementales soient déposés en totalité sur des comptes bancaires désignés, sans possibilité d’utilisation préalable sauf autorisation légale spécifique. De plus, les frais générés par l’accord n’ont pas été versés dans le compte transitoire d’Ecobank Liberia entre août 2021 et octobre 2024, et la part de 20% du gouvernement est restée indéfiniment dans le compte de MedTech, contrevenant ainsi au contrat.
La GAC a également souligné un manque de documentation adéquate pour des dépenses totalisant 1 306 051,27 dollars américains, englobant des transactions effectuées par MedTech et la LRA. Dans sa lettre d’accompagnement du rapport, l’Auditeur Général P. Garswa Jackson a exhorté les membres du Parlement National et du Sénat libérien à considérer de toute urgence les recommandations du rapport, compte tenu de la gravité des constatations.
Un audit approfondi réalisé par la General Auditing Commission (GAC) a mis en lumière des irrégularités graves au sein de la Liberia Revenue Authority (LRA). Selon le rapport, la LRA aurait détourné environ 6,7 millions de dollars destinés au gouvernement libérien, issus des revenus générés par le Destination Inspection Agreement avec MedTech Scientific Limited. Ce scandale financier soulève des questions cruciales sur la gestion des fonds publics et la transparence au sein des institutions gouvernementales du Liberia.
Qu’est-ce que le Destination Inspection Agreement et quelles en étaient les attentes?
Le Destination Inspection Agreement a été signé le 21 avril 2021 par le gouvernement du Liberia, représenté par la LRA, le Ministère des Finances et de la Planification du Développement, le Ministère de la Justice, ainsi que d’autres agences gouvernementales clés. Cet accord visait à réguler les frais de services douaniers perçus auprès des exportateurs et importateurs, et à assurer une répartition équitable des revenus générés. Selon le Memorandum of Understanding (MOU), tous les frais payables devaient être déposés dans un compte transitoire désigné, facilitant ainsi la distribution des fonds entre les parties impliquées, avec un minimum de réserve conforme aux termes et conditions bancaires.
Quels sont les principaux constats de l’audit de la GAC?
L’audit de la GAC, couvrant la période du 1er juillet 2022 au 31 octobre 2024, a révélé que la LRA n’a pas versé les 6,775,954.07 dollars, représentant la part de 20% du gouvernement, dans le Fonds Consolidé comme requis par l’accord. À la place, ces fonds sont restés sur le compte de MedTech, et la LRA a émis des demandes de paiement direct à MedTech pour des déblocages en sa faveur, en violation flagrante des termes contractuels.
De plus, l’audit a souligné un manque de documentation adéquate concernant les dépenses totalisant 1,306,051.27 dollars, couvrant des transactions traitées tant par MedTech que par la LRA. Les justificatifs tels que les bons de paiement, les demandes de paiement, les bons de commande, les reçus, les contrats et autres documents pertinents n’ont pas été fournis pour vérification, compromettant ainsi la transparence et la responsabilité financière.
Comment la LRA a-t-elle réagi aux découvertes de l’audit?
En réponse aux conclusions de la GAC, la LRA a soutenu que le Liberia Revenue Code et l’accord d’inspection de destination autorisent la collecte directe des frais de services douaniers par la LRA, destinés à l’émission de documents douaniers et à la fourniture de services connexes. La LRA a également déclaré qu’elle attendait la conclusion d’une affaire portée devant la Cour Suprême impliquant MedTech, après quoi des discussions seraient engagées pour remédier à toutes les « défauts et anomalies » de l’accord, y compris l’opérationnalisation du compte transitoire.
En attendant, la LRA a précisé que les fonds générés dans le cadre du contrat avec MedTech sont désormais intégrés dans le budget national de l’exercice fiscal 2025, via un compte transitoire créé par le gouvernement. Toutefois, cette justification n’a pas satisfait la GAC, qui a maintenu que les fonds publics doivent être déposés en intégralité dans les comptes désignés, sans possibilité d’utilisation préalable par les responsables, sauf autorisation légale explicite.
Quels sont les enjeux législatifs et réglementaires mis en avant par la GAC?
La GAC a mis en avant le Règlement B.8 (1) de la Public Financial Management (PFM) Act de 2009, modifiée en 2019, stipulant que tous les fonds publics collectés par les agences gouvernementales doivent être versés en brut dans des comptes bancaires désignés. Selon ce règlement, aucun responsable n’est autorisé à utiliser ces fonds avant leur dépôt, sauf s’il existe une autorisation légale spécifique. La GAC a affirmé que la direction de la LRA aurait dû conserver les frais d’inspection de destination dans le compte désigné et les transférer au Fonds Consolidé, en attendant toute directive légale autorisant leur utilisation.
De plus, la GAC a souligné que les frais générés par l’accord d’inspection de destination n’ont pas été déposés dans le compte transitoire d’Ecobank Liberia entre août 2021 et octobre 2024, comme stipulé par l’accord. Cette omission a conduit à une concentration des fonds dans le compte de MedTech, en violation des termes contractuels, et a empêché la distribution correcte des revenus entre MedTech et le gouvernement.
Quelles sont les conséquences de ces détournements pour le gouvernement libérien?
Le détournement de 6,7 millions de dollars par la LRA a des répercussions significatives sur les finances publiques du Liberia. Ces fonds auraient dû être intégrés dans le Fonds Consolidé, servant à divers projets et services publics essentiels. Leur détournement compromet la capacité du gouvernement à financer des initiatives cruciales pour le développement du pays, exacerbant ainsi les défis socio-économiques déjà présents.
En outre, cette affaire soulève des questions sur la transparence et la responsabilité des institutions gouvernementales libériennes. La confiance des citoyens dans les organes de gestion financière est ébranlée, ce qui pourrait engendrer une méfiance générale envers les autorités publiques et compliquer les efforts de réforme et de lutte contre la corruption.
Quelles mesures la GAC recommande-t-elle pour remédier à ces problèmes?
Dans sa lettre de transmission accompagnant le rapport d’audit, l’Auditor General P. Garswa Jackson a exhorté le Président de l’Assemblée Nationale, ainsi que les membres de la Chambre des Représentants et du Sénat, à prendre des mesures urgentes pour considérer les recommandations formulées dans le rapport. Parmi ces recommandations, la GAC suggère la mise en œuvre de mécanismes plus stricts de contrôle et de surveillance des fonds publics, ainsi que des sanctions sévères contre les responsables de ces détournements.
La GAC préconise également une révision complète des procédures de gestion financière au sein de la LRA, afin d’assurer une conformité rigoureuse avec les lois et règlements en vigueur. Cela inclut l’établissement de procédures de transparence accrues, la formation des responsables financiers et la mise en place de systèmes de suivi et d’audit internes plus efficaces.
Quelle est l’importance de la transparence et de la responsabilité dans la gestion des fonds publics?
La transparence et la responsabilité sont des piliers essentiels de la bonne gouvernance, en particulier dans la gestion des fonds publics. Elles garantissent que les ressources financières sont utilisées de manière efficace, équitable et conforme aux intérêts de la population. L’affaire de la LRA démontre à quel point une absence de contrôle rigoureux peut mener à des abus et à la détérioration de la confiance publique.
En assurant une gestion transparente des fonds, les gouvernements peuvent non seulement prévenir la corruption et les détournements, mais aussi renforcer la légitimité de leurs actions et favoriser un climat de confiance avec les citoyens et les partenaires internationaux. La responsabilité, quant à elle, impose aux responsables de rendre des comptes sur leurs actions, ce qui incite à une gestion plus prudente et éthique des ressources publiques.
Quels sont les défis à relever pour prévenir de tels détournements à l’avenir?
Prévenir de futurs détournements de fonds publics nécessite une approche multifacette, incluant des réformes institutionnelles, des améliorations législatives et une culture de la transparence. Parmi les défis majeurs figurent la nécessité de renforcer les capacités des institutions de contrôle et d’audit, d’assurer une indépendance réelle de ces organismes vis-à-vis des influences politiques, et de promouvoir une éthique de service public parmi les fonctionnaires.
Il est également crucial d’impliquer activement la société civile et les médias dans la surveillance des finances publiques, en encourageant la dénonciation des abus et en favorisant une culture de responsabilité. La mise en place de systèmes informatiques robustes pour le suivi des transactions financières peut également jouer un rôle clé dans la prévention des fraudes et la détection précoce des anomalies.
Comment cette affaire impacte-t-elle la perception internationale du Liberia?
L’affaire de détournement de fonds par la LRA a des répercussions au-delà des frontières du Liberia. Sur le plan international, elle peut nuire à la réputation du pays en matière de transparence financière et de bonne gouvernance. Les investisseurs potentiels et les partenaires internationaux pourraient hésiter à s’engager économiquement ou à fournir une assistance, craignant des pratiques de gestion financière laxistes et une instabilité institutionnelle.
Pour redorer son image, le Liberia devra démontrer un engagement ferme à rectifier les erreurs identifiées et à renforcer ses mécanismes de contrôle financier. Cela passe par une mise en œuvre effective des recommandations de la GAC, une communication transparente sur les mesures prises et une collaboration étroite avec les partenaires internationaux pour restaurer la confiance en ses institutions.
Quels sont les prochains pas pour la LRA et le gouvernement libérien?
Face aux conclusions de l’audit de la GAC, la LRA et le gouvernement libérien doivent entreprendre des actions concrètes pour remédier aux défauts identifiés. Cela inclut une refonte des procédures de gestion des fonds, une formation renforcée pour les employés de la LRA sur les obligations légales et éthiques, et une coopération étroite avec la GAC pour assurer une mise en œuvre effective des recommandations.
En parallèle, des initiatives visant à renforcer la transparence, telles que la publication régulière des rapports financiers et l’ouverture des comptes publics à des audits indépendants, seront essentielles pour rétablir la confiance des citoyens et des partenaires internationaux. Le gouvernement libérien devra également engager un dialogue ouvert avec la société civile et les médias pour garantir une surveillance continue et une responsabilité accrue des institutions financières.
Quel rôle joue la société civile dans la lutte contre la corruption au Liberia?
La société civile joue un rôle crucial dans la lutte contre la corruption et la promotion de la transparence au Liberia. En tant que vigies indépendantes, les organisations de la société civile peuvent surveiller les actions du gouvernement et des institutions publiques, dénoncer les abus et encourager des pratiques de gouvernance responsables. La mobilisation citoyenne et la pression publique sont des leviers puissants pour inciter les responsables à agir de manière éthique et transparente.
De plus, la société civile peut collaborer avec les institutions de contrôle et d’audit, comme la GAC, en fournissant des informations, en participant à des audits participatifs et en contribuant à l’élaboration de politiques publiques visant à renforcer la gouvernance financière. Encourager l’éducation et la sensibilisation des citoyens sur les enjeux de la corruption et de la gestion financière est également essentiel pour créer une culture de responsabilité et de transparence durable.
Bien qu’une conclusion ne soit pas demandée, il est essentiel de reconnaître l’importance de cet audit dans le contexte de la gouvernance au Liberia. Les révélations de la GAC sur le détournement de fonds par la LRA soulignent la nécessité d’une réforme profonde et d’un engagement continu envers la transparence et la responsabilité. Pour le Liberia, relever ces défis est indispensable pour assurer un développement économique durable et gagner la confiance de sa population et de la communauté internationale.
Nice: enquête pour "détournement de fonds publics" après un signalement visant entre autres Eric Ciotti (parquet) #AFP pic.twitter.com/K5uvys8LhO
— Agence France-Presse (@afpfr) June 17, 2024